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Le ad blocking, symptôme d’une industrie qui doit se réinventer
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Le ad blocking, symptôme d’une industrie qui doit se réinventer

  • Niveau Technique
Média & SEM Stratégie d'affaires

Lors de ma visite à AdvertisingWeek New York, deux grands sujets ont retenu mon attention : le ad blocking, en français blocage de publicité, et l’utilisation de données par les marketeurs pour rejoindre leur cible. Une grande question est ressortie dans les conférences et discussions de couloir : est-ce que le ad blocking serait un symptôme de la surutilisation des données de navigation? Et que dire de l’avènement de l’achat programmatique? Les chiffres confirment la tendance : selon une étude de IAB Canada en partenariat avec Comscore parue en mai 2016, une personne sur six utiliserait un bloqueur de publicité au Canada, et cette proportion atteint 28 % pour les milléniaux de sexe masculin, une cible extrêmement prisée par les marketeurs.

 

 

La réaction des publishers a été, dans beaucoup de cas, d’ajouter des espaces publicitaires afin de pallier aux revenus décroissants, ce qui ne vas pas sans déplaire aux utilisateurs.

 

Le ad blocking fait souffrir les créateurs de contenu. Alors que les méthodes d’achat programmatiques ont donné un coup dur aux plus petits joueurs de l’industrie (blogueurs, régies publicitaires avec une cible très nichée, etc.), la popularité des bloqueurs de publicité est souvent perçue comme le dernier clou du cercueil. La réaction des publishers a été, dans beaucoup de cas, d’ajouter des espaces publicitaires afin de pallier aux revenus décroissants. Ce qui ne vas pas sans déplaire aux utilisateurs. Même Brian Myles, de Le Devoir a pris position la semaine dernière, en disant que les publicitaires ont un examen de conscience à faire. Il explique que, selon lui, seuls les plus gros joueurs ont quelque chose à tirer de l’industrie dans son état actuel et que les éditeurs québécois souffrent de l’avènement du programmatique. Il présente le lectorat du Devoir comme l’élite au Québec, avec des revenus élevés, des lecteurs éduqués; une cible, donc, plus qu’enviable pour les annonceurs. Certains seraient tentés de répondre à monsieur Myles que son véritable problème est de ne pas savoir se sortir d’un modèle d’affaires publicitaire, ou de subir les conséquences du retard qu’accusent les entreprises québécoises en matière de commerce en ligne. Mais c’est un autre débat…

 

La question qui se pose ici est : comment renverser la vapeur? Plusieurs parlent de la création de contenus natifs comme du meilleur moyen de contourner les ad blockers, alors que d’autres y voient un genre de prostitution du contenu. Il faut avouer que la ligne est souvent mince entre contenu commandité et publicité déguisée en vrai contenu digne de ce nom.

 

Internet killed the TV star

Revenons en arrière, voulez-vous? En 1940, la première publicité TV faisait son apparition sur les ondes. Un moyen efficace pour les stations de télévision de générer un revenu permettant de produire du contenu de meilleure qualité et plus engageant. La télé a débuté, un peu comme le web, en offrant du contenu complètement gratuitAvec le temps, les câblodistributeurs ont commencé à facturer l’accès à des chaînes spécialisées de nouvelles, puis de sport. Et sans s’en rendre compte, on débourse maintenant des sommes importantes, parfois des centaines de dollars par mois, pour avoir accès au contenu, en plus d’être mitraillés de publicités de 30 secondes, d’intégrations de produits, de commandites, et quoi d’autre!

Dans les années 90, l’avènement du web domestique amène une révolution : le retour du contenu 100 % gratuit, et de plus, interactif. La plus jeune génération délaisse tranquillement la télévision pour le web et une réelle démocratisation du contenu émerge. Tout est accessible à tous, gratuitement. On doit seulement subir les quelques bannières ici et là afin d’accéder à tout le contenu que l’on veut!

Les temps évoluent, à l’instar des méthodes de collecte et d’unification des données qui s’améliorent. Tellement que les annonces sont de plus en plus précises. On sait (plus ou moins) ce qu’un internaute aime, ce qu’il aime moins, son genre, son âge, ses passions, dans quelle région il habite, si son revenu est élevé…

 

Le règne de la donnée

Face à cette réalité, le ad blocking est certainement un symptôme de la surutilisation des données de navigation des utilisateurs et de la multiplication des espaces publicitaires sur une même page.

 

« Ad blocking is a cry for help from users who are tired of having their experience ruined« . – Lynda Clarizio, Présidente, US Media pour Nielsen.

 

Nous avons tous déjà été reciblés par un annonceur qui tenait ABSOLUMENT à ce que l’on séjourne à son hôtel, bien que l’on y ait déjà passé la dernière semaine. La donnée de « booking » ne s’est jamais rendue à son oreille, et il continue de nous présenter son offre imbattable pour notre séjour à Orlando d’il y a deux semaines. Il fut un temps où le contexte primait, l’association avec des sites web et du contenu de qualité valait quelque chose pour les annonceursPlus ça va, plus on délaisse le contexte pour une poupée russe de données qui nous dit avec une relative certitude qu’un utilisateur est bel et bien in market pour notre produit. Si on ne fait pas plus attention à l’expérience des utilisateurs en ligne, les plus pessimistes ont raison de prédire au web une crise semblable à celle subie par la télé. 

 

L’émotion ne se mesure pas avec un cookie

Avec toute cette donnée, les créatifs sont de plus en plus axés sur la prise d’action immédiate, le BUY NOW avec un prix dynamique branché sur l’inventaire en temps réel en plus de produits complémentaires à un achat qu’on a possiblement effectué il y a deux semaines déjà. Les marketeurs ont migré des millions de dollars vers des médias mesurables, quantifiables et qui démontrent un ROI béton et oublient parfois qu’une relation avec un consommateur dépend beaucoup de l’émotion que l’on ressent pour une marque. On a cessé de créer des marques; on crée plutôt des modèles d’affaires qui ressemblent plus à de la comptabilité qu’à du marketing. On est loin de la campagne “I’d like to teach the world to sing” de Coca-Cola.

Est-ce qu’on aurait oublié qu’on s’adresse à un être humain, avec des émotions et une démarche unique à lui-même, plutôt qu’à un cookie? Peut-être qu’on devrait se servir de la quantité astronomique de données disponibles pour raffiner nos messages, optimiser nos pages de destination, pas seulement nos méthodes de ciblage.

 

 

 

 

Il n’y a pas si longtemps, quand un éditeur activait un paywall sur son site web, la grogne du public était sans merci. Pourtant, une majorité d’entre nous sont de fervents utilisateurs (et même des ambassadeurs) de marques comme Netflix et Spotify. Maintenant, quelle est la place de l’annonceur dans ce modèle? Et pour le petit joueur qui ne peut se permettre une intégration dans une grande production? Ce sont des questions avec lesquelles nous devons composer au quotidien. 

Adviso a une philosophie axée sur la performance, la donnée a donc une très grande valeur à nos yeux et, nous le croyons, pour les annonceurs. Cela dit, il est facile d’oublier que l’on s’adresse à un être humain et non à un cookie. Le storytelling a sa place, encore plus maintenant qu’auparavant. Avant de m’inviter à faire le tour de l’Europe, peut-être qu’on peut discuter un peu? Apprendre à faire connaissance? Peut-être à ce moment-là on se trouvera des points en commun. 😉

La surabondance de la mesure fait mal à l’industrie, et l’illusion du retour immédiat d’un investissement sur le web commence à s’estomper petit à petit. Lorsqu’on achète un panneau d’affichage, on ne s’attend pas à un retour mesurable et immédiat, n’est-ce pas? Pourquoi alors avoir ces attentes démesurées lorsqu’on achète un Billboard sur le site d’un grand quotidien? L’industrie doit se regarder en face et revenir aux sources du marketing; tout ne se mesure pas. Selon moi, on doit revenir à une communication intéressante, engageante. Les marques doivent apprendre à se servir du web comme un endroit conversationnel, two way, et non un porte-voix. L’avenir appartiendra à ceux qui réduiront leur dépendance au média payant et qui capitaliseront sur une présence organique forte et un réel engagement avec leur clientèle.