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Au-delà des cookies: comprendre le nouveau paradigme de la mesure marketing
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Au-delà des cookies: comprendre le nouveau paradigme de la mesure marketing

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Même si mon équipe et moi chez Adviso sommes parmi les premiers à avoir popularisé le terme « apocalypse des cookies tiers » dans les quatre dernières années, je suis aujourd’hui parmi les premiers à dire qu’il faut arrêter de l’utiliser. 

Pourquoi? Parce que les choses ont changé et que ce terme ne reflète plus adéquatement l’ampleur du changement qui émerge dans l’écosystème des marketeurs. Aujourd’hui, il faut plutôt parler d’un changement de paradigme de la mesure marketing, un mouvement qui s’est vu progresser à très grande vitesse depuis deux ans, et dont la dernière phase sera en fait l’abolition des cookies tiers en 2023. 

Je m’explique… 

En effet, la disparition des cookies tiers en 2023 ne représente qu’une seule pièce d’un casse-tête beaucoup plus grand dans le monde du marketing et de la publicité en ligne. Comme la compagnie Meta (Facebook) l’a réalisé à ses tristes dépens en 2021, lorsqu’elle a vu son action chuter de 45 %, c’est toute la notion de la mesure et du traçage des internautes qui fait face à des bouleversements, pas seulement les cookies. 

Dans un article corédigé avec mon professeur de thèse Daniel Lemire en 2018, sur le site The Conversationj’explique que les changements considérables qui touchent la circulation des données n’ont pas pour unique but de protéger la confidentialité des internautes. En arrière-plan, une véritable guerre des données est en train d’avoir lieu entre les grands joueurs du GAFAM; à laquelle d’ailleurs semble vouloir s’ajouter nul autre que M. Elon Musk depuis son offre d’achat de la plateforme Twitter. 

Ceci dit, pour ramener les choses plus spécifiquement dans le contexte des données liées à l’affichage publicitaire en ligne, il faut se rappeler que le cookie n’est plus l’acteur principal comme identifiant des utilisateurs en ligne. Depuis 2019, c’est plus de la moitié des budgets publicitaires qui sont attribués aux applications mobiles, avec une part de moins en moins importante pour la publicité par cookies sur fureteur web (Chrome, Safari, etc.)

Par conséquent, parler uniquement de l’apocalypse des cookies tiers en 2023, c’est ne parler que de 40% de l’investissement publicitaire en marketing numérique. Dans cette optique, on peut dire que l’apocalypse du traçage des utilisateurs à des fins de ciblages publicitaires a déjà eu lieu, suite au lancement du protocole ATT (App Tracking Transparency) par Apple dans iOS 14.5, qui oblige désormais les applications mobiles à demander l’autorisation des utilisateurs avant de suivre leur activité sur d’autres applications et sites Web.

De plus, Google vient de tuer son propre identifiant mobile sur Android et le réseau Google Play, appelé le GAID « Google Advertising ID » (homologue du IDFA d’Apple qui est désuet depuis longtemps). En effet, ce déploiement progressif des services Google Play affecte toutes les applications depuis Android 12 en 2021, et s’est étendu sur tous les appareils prenant en charge Google Play depuis le 1er avril 2022. 

Les développeurs d’applications doivent maintenant utiliser le app set ID pour maintenir leur capacité de mesure analytique ou encore pour la détection de fraude. Mais, en ce qui concerne la publicité, le paradigme change complètement. Google lance quatre outils ou API pour remplacer les cookies et les identifiants mobiles par SDK, notamment :  

  1. L’API Topics, nouvelle méthode de ciblage respectueuse de la vie privée proposée par Google pour les cookies tiers. Il s’agit d’un système de ciblage d’audience qui attribue à un utilisateur un ensemble d’intérêts selon les sites Web qu’il a visités antérieurement. Mais tout se passe à même le fureteur dans un sandbox, donc aucune de ses données n’est renvoyée vers le serveur d’un annonceur ou d’une plateforme tierce.
  2. L’API Fledge, qui va devenir le nouveau standard en remarketing. Fledge va rendre impossible de tracer spécifiquement les utilisateurs ciblés. Le système va fonctionner avec un modèle d’enchère à même le fureteur, dans le but d’afficher l’annonce la plus pertinente à présenter, sans partager la donnée de l’utilisateur à un serveur tiers. 
  3. L’API Attribution Reporting de Chrome, qui permet de continuer à mesurer à quel moment un clic ou une vue sur une annonce conduit à une conversion, tel qu’un achat sur un site d’annonceur. Toutefois, il est conçu pour ne pas être utilisé par des plateformes de tierces parties pour tracer des utilisateurs sur un site web. Somme toute, il s’agit d’une façon de continuer à générer des rapports d’attribution, sans pour autant révéler tous les détails sur vous et votre activité.
  4. Le SDK Runtime, c’est en quelque sorte la version Google du protocole ATT, quoique moins sévère et restrictive. Grâce au concept de bac à sable d’application, ce système vise à réduire l’accès et le partage non divulgués des données d’application d’un utilisateur par des SDK tiers. Il exerce un contrôle d’accès aux données et aux API bien définis. 

Ce changement de paradigme correspond sans surprise à un autre changement chez Google, qui mettra fin à la version actuelle de Google Analytics d’ici 2023 pour passer à GA4. La réingénierie complète de la plateforme semble être en parfaite synchronisation avec la fin des cookies tiers et du GAID. Est-ce une coïncidence? Peut-être. 

Chose certaine, ce n’est pas pour rien que Google Analytics 4 se dote d’une grande capacité de réconcilier les données utilisateurs par apprentissage machine, afin de pallier les écarts de données entraînés par tous ces changements. ​​D’ailleurs, c’est en partie grâce à l’unification de la donnée mobile et web offerte par GA4 que s’ouvrira cette nouvelle possibilité. 

Ce faisant, si vous n’avez toujours pas commencé votre migration vers GA4, ne perdez pas une minute de plus! 

Concrètement, ça veut dire quoi dans le quotidien des marketeurs ?

Concrètement, ça veut dire que l’apocalypse des cookies tiers est l’une des dernières étapes de l’ensemble du changement de paradigme de la mesure marketing depuis les deux dernières années. En d’autres termes, l’apocalypse ne commence pas en 2023, elle entre plutôt dans sa phase terminale. 

Malheureusement, plusieurs marketeurs ne réalisent toujours pas qu’aujourd’hui même, dans le back-end, tous les systèmes de mesure commencent à être déphasés en ce qui concerne l’analytique marketing. Il faut déjà, en 2022, tenir compte des incohérences grandissantes des outils analytiques, même en first party cookie. 

Par exemple, depuis 2017, dans le monde post-ITP (Intelligent Tracking Protocol) de Safari, il devient de plus en plus difficile de réconcilier les données des utilisateurs provenant d’un navigateur Apple. Ces données incohérentes viennent brouiller les données plus propres des autres sources de trafic arrivant sur votre site web ou votre application. Plus spécifiquement, les impacts sont les suivants : 

  • Augmentation biaisée de certaines métriques,
    • Nombre d’utilisateurs uniques
    • % de nouveaux utilisateurs
  • Baisse de certaines autres :
    • Nombre de visites par utilisateur
    • Taux de conversion
    • Fréquence de visite
  • Parcours utilisateur plus difficilement identifiable
  • Difficulté à reconnaître les utilisateurs s’il n’y a pas de notion de login

Sans avoir pour le moment un pourcentage ferme, il est déjà possible pour notre équipe analytique et science des données de confirmer que chaque année depuis 2017, toutes les activités de mesure ci-haut se détériorent de façon plus importante. 

Les autres changements déployés par Apple et Google en 2021 et 2022 ne font qu’accentuer cette disparition de l’ancien paradigme de la mesure marketing. En 2023, ça sera la dernière étape, ou devrais-je dire, la première année d’un tout nouveau paradigme en marketing.  

Quel est le nouveau paradigme de la mesure marketing en 2023 ?

En une seule phrase : priorisez plus sérieusement la collecte et l’exploitation de la donnée primaire

Comme l’explique Suzanne Vranica dans le Wall Street Journal, les annonceurs avisés prennent le changement de paradigme très au sérieux depuis les deux ou trois dernières années. C’est pourquoi ces entreprises sont en train de lancer toute une gamme d’initiatives visant la collecte de données primaires à propos de leurs clients. 

Au niveau tactique, le centre nerveux de la collecte de données primaires passe par l’obtention par consentement des adresses courriels. Comme le rapporte eMarketer, rien n’est mis à l’écart pour convaincre les consommateurs de partager cette précieuse information. Ces entreprises misent sur le développement d’une stratégie d’acquisition de données primaires agressive, mais tout en mettant l’accent sur l’échange de valeur. Selon un rapport rédigé par Fluent en juin 2021 intitulé « Consumers, Data, and Control: Driving Loyalty and Trust Through a Strong Value Exchange », voici la liste des tactiques en croissance pour inciter le partage d’informations personnelles :

  • Un rabais spécial en échange du courriel
  • Une offre exclusive
  • Un concours
  • Un cadeau gratuit
  • Du contenu exclusif

Mais ce n’est pas suffisant de collecter une tonne de courriels. Il faut d’abord une stratégie de données bien réfléchie, arrimée avec une infrastructure solide pour gérer ces données, tout en assurant le respect de la confidentialité. À ce niveau, les grandes initiatives de gestion des données primaires sont les suivantes : 

  • Le développement d’une stratégie de données et d’un plan de gouvernance 
  • La création d’un lac ou d’un entrepôt de données marketing client pour combiner les données des plateformes CRM, courriels, systèmes de ventes, analytique en ligne (Google ou Adobe) et média (Google Ads, Facebook Ads, etc.)
  • Le développement de modèles ou l’acquisition d’outils pour unifier les données et dresser une vue holistique du client
  • L’intégration des données secondaires provenant de partenaires réputés dans l’industrie comme Vividata, Nielsen et Comscore
  • L’implémentation de plateformes et infrastructures de données clients (CDP)
  • L’intégration de ces plateformes côté serveur pour jouer sur la fenêtre de 1 jour et limiter la perte de données
  • Le développement de modèles de marketing mixte avec ses données primaires agrégées 
  • Le développement de modèles d’apprentissage machine spécifiquement adaptés aux données primaires de l’entreprise 

La question à se poser en tant que marketeur est la suivante : parmi toutes ces initiatives, combien d’entre elles sont actives ou en développement dans votre équipe ou département? 

Si vous faites partie des entreprises qui n’ont toujours pas de feuille de route en matière d’acquisition et de gestion des données primaires, qu’allez-vous faire le 1er janvier 2023?