La conférence de Steve Wozniak et votre stratégie digitale
Lundi soir, la Chambre de commerce du Montréal Métropolitain présentait Entretiens avec Steve Wozniak : au travers d’entretiens avec 4 personnalités différentes, le cofondateur d’Apple présentait sa vision sur 4 thèmes qui lui sont souvent associés :
- La création d’Apple
- L’entreprenariat
- L’éducation
- La technologie
J’ai pensé vous présenter quelques faits saillants de la soirée qui pourraient être à considérer dans l’élaboration de vos stratégies en ligne.
Inclure l’utilisation d’appareils mobiles à votre événement
Au début de la présentation, l’animatrice a rappelé -comme dans tout événement- à l’auditoire de mettre son téléphone en mode silencieux. Par contre, elle a souligné de ne pas l’éteindre, et a invité l’audience à amener la discussion en ligne, en précisant quel hashtag utiliser (#wozccmm). Une meilleure pratique souvent oubliée.
Je crois aussi qu’il est essentiel que les organisateurs d’événements assouplissent aussi leurs politiques quant à la prise de photos, qui sont, dans la plupart des cas, de bonnes publicités pour leur événement… De même, il y a une mer de possibilités encore plus riches pour un créateur ingénieux qui voudrait tenir compte du Web social dans son événement.
Apple a dû faire un gros travail humain de ventes pour lancer l’entreprise
Wozniak a dit “The business wasn’t done in the garage”, c’est Steve Jobs qui appelait et rencontrait des acheteurs potentiels… je crois qu’il s’agit là d’un rappel essentiel à tous ceux qui développement un produit technologique : même le meilleur produit ne peut pas décoller sans un effort marketing notable. L’histoire d’AirBnB est un autre bon exemple qui déboulonne le mythe du produit qui génère de la croissance sans effort marketing.
Les décisions initiales de conception étaient des choix logiques, basés sur les coûts
Aux débuts d’Apple, Wozniak a dû faire nombre de décisions d’ingénierie basées sur la dure réalité de l’entreprise en démarrage, pour non seulement améliorer le coût de revient des produits, mais surtout parce que l’entreprise n’était pas en mesure de se payer un grand inventaire.
C’est une autre leçon clairement applicable au monde du commerce électronique : comme la clientèle est à distance de toute façon, pourquoi ne pas considérer ou tester de nouvelles approches de gestion des opérations qui minimisent l’investissement initial et les coûts fixes, par exemple en ayant recours au juste-à-temps ou au drop-shipping, via les fournisseurs et des tiers partis?
Dans un contexte où les prévisions doivent se réajuster rapidement, où le marketing se discute de plus en plus au coût unitaire d’acquisition (CPA) et au rendement, et de moins en moins sous forme de budgets annuels fixes, où l’infrastructure T.I. se réajuste dans le cloud au gré des fluctuations quotidiennes, le reste des disciplines de gestion auraient parfois aussi avantage à suivre la vague.
L’innovation initiale était d’offrir un produit plus petit, plus accessible
Même Wozniak n’y a pas toujours cru, et a raconté avoir dû être convaincu par un investisseur de quitter son travail sur des systèmes mainframe chez HP pour se consacrer totalement à Apple. Cette anecdote rappelle le concept de disruptive innovation de Clayton Christensen, qui fait la différence entre l’innovation “incrémentale” (ex.: pour Wozniak, améliorer encore davantage les systèmes d’entreprise chez HP), et l’innovation qui bouleverse le marché en allant dans une direction complètement nouvelle (ex.: créer un ordinateur personnel qui a une valeur beaucoup moindre et un marché non assuré, comme l’Apple).
Tout stratège devrait garder ce dilemme en tête dans son travail : il y a des marchés entiers qui n’attendent que d’être découverts… mais ces marchés sont souvent liés à des produits plus simples, plus accessibles, et il existe encore peu de données qui en démontrent immédiatement la valeur.
iWatch sera différente en ne faisant pas tout ce qu’un ordinateur ou un téléphone fait
Wozniak a essayé plusieurs modèles de montres intelligentes et les a tous abandonnés, parce qu’elles essayaient d’être un petit téléphone ou ordinateur. Au même moment, la iWatch prévue pour cette année devra fonctionner en conjonction avec un autre appareil iOS (ex.: iPhone), et servira à y ajouter des capacités, plutôt que de le remplacer. (Cette approche est d’ailleurs en conformité avec les deux points précédents, car elle rend probablement la montre plus coûteuse à produire et plus accessible pour le consommateur.)
L’avenir nous dira d’ailleurs si les prédictions de Wozniak sont justes, car une petite entreprise montréalaise, Neptune, annonçait un produit “révolutionnaire” avec l’approche inverse cette semaine. (Chez Engadget, on n’a pas semblé convaincu.) Quoi qu’il en soit, dans une mer de bonnes idées, la partie la plus difficile (et importante) d’une stratégie est souvent de contrôler ce que l’on doit faire en priorité, et de préciser ce qu’on ne fait pas (car les possibilités abondent, ce qui est rarement le cas des ressources).
Impliquer les ingénieurs dans la création des produits
Si les idées initiales pour des nouveaux produits peuvent provenir de plusieurs rôles dans une organisation, il est essentiel d’impliquer des spécialistes techniques dès le début d’un projet, d’abord pour valider leur faisabilité, mais surtout pour proposer des améliorations à ce qui a été imaginé. C’est sur eux que repose la lourde responsabilité de livrer la proposition unique de vente, et leur approche neutre d’optimisation peut aider à ramener un esprit pratique dans la vision des gens d’affaires.
L’utilisation des technologies par les professeurs est un grand défi
Au travers de ses années d’enseignement, Wozniak a trouvé que les jeunes avaient une facilité à s’approprier la technologie que leurs professeurs ne partageaient pas. Dans un contexte où l’éducation est la clé pour assurer un bassin de spécialistes technologiques dont nous aurons tous besoin dans l’avenir, cette situation est inquiétante.
Comme stratège Web, l’accès des entreprises à des spécialistes du digital est un aspect que nous pouvons de moins en moins négliger. Pour chaque bonne idée, il faudra une équipe, et dans la plupart des départements de l’entreprise moyenne, seule une minorité d’employés connaissent bien les possibilités des technologies d’aujourd’hui. C’est entre autres pourquoi nous construisons nombre d’activités de formation chaque année.
Wozniak est même allé plus loin en précisant que nous avons un devoir commun de reformer les gens qui perdent leur emploi dans un contexte d’innovation technologique.
“We don’t know how the brain is wired. At all.” ou le paradoxe des choix “logiques” en stratégie
Évoquant l’intelligence artificielle, la reconnaissance de la parole et le rythme d’innovation en informatique, Wozniak a souligné que nous en savons encore très peu sur le cerveau humain, et que la machine est encore très loin de s’approcher de sa complexité.
Ce principe devrait être présent à l’esprit de tout stratège digital, en particulier dans des domaines comme le marketing et l’innovation : même en optimisant à l’extrême un produit ou une campagne, en ayant une mesure statistique infaillible de ce qui fonctionne ou non, des pans entiers de nos stratégies reposent sur notre intuition et celle de nos clients. Par exemple, dans le cas de tests A/B, notre expérience nous a démontré que malgré les outils soient très fiables du point de vue statistique, le grand défi a toujours été de savoir quoi tester… et à cet égard, les possibilités sont infinies.