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Facebook Instant Article : la nouveauté qui change la face du Web
1L’art de la gestion de projet2Un projet à succès commence par une bonne gouvernance3Cascade, agilité, demandes de changement?

Facebook Instant Article : la nouveauté qui change la face du Web

  • Niveau Technique
Médias sociaux Innovation

Grosse nouvelle dans le milieu des médias cette semaine : Facebook a conclu un partenariat avec de grands médias comme le New York Times, BuzzFeed et National Georgaphic pour héberger leur contenu sur les serveurs du réseau social. Ces articles seront présentés dans un nouveau format, le Instant Article, et offriront une meilleure expérience de lecture.

La rumeur circulait depuis un certain temps dans le milieu journalistique américain, mais les termes et la nature du produit viennent tout juste d’être connus. Et l’offre n’est pas aussi risquée que certains commentateurs le prédisaient.

Pour ces commentateurs, cette offre représentait un pacte faustien. Après tout, comme Facebook joue déjà un rôle très important pour les médias à cause de son fil de nouvelles (newsfeed), héberger les contenus sur les serveurs du géant de Menlo Park ne représenterait que la fin logique où Facebook règnerait en roi et maître sur le monde des médias. Or, pour apaiser ces craintes, Facebook a offert plusieurs concessions :

  • Les partenaires pourront garder 100 % des revenus générés par les publicités qu’ils vendent sur les articles (et 70 % des revenus de publicités vendues par Facebook)
  • Ils pourront mesurer la performance de leurs articles avec les outils de leur choix (comme Google Analytics et Adobe Analytics)
  • Les articles pourront utiliser des polices et feuilles de style propres à chaque média

Les bénéfices additionnels pour ces partenaires sont :

  • Des articles qui se téléchargent de façon instantanée
  • Une expérience plus immersive
  • La possibilité de mieux monétiser leur audience sur Facebook
  • Aucun coût additionnel pour l’hébergement de ces articles

Avec ses 1,25 milliard d’utilisateurs mensuels, Facebook est de loin le réseau social le plus utilisé. La compagnie joue déjà un rôle central dans le partage et la diffusion de nouvelles et accapare déjà un large pourcentage du temps passé sur mobile. Comme la compagnie n’a ainsi clairement pas « besoin » d’offrir des termes aussi généreux avec les grands groupes médiatiques, il est juste de s’interroger sur ses intentions à conclure ce partenariat.

 

L’objectif de Facebook

 

Il est possible de faire plusieurs hypothèses sur les motivations de Facebook.

 

Augmenter ses capacités de profilage

Comme Facebook possède déjà énormément d’informations sur les préférences de lecture, les habitudes de navigation et les applications préférées d’un large éventail de ses utilisateurs, la capacité de ciblage n’est certainement pas la première priorité de Mark Zuckerberg.

 

Accroître l’enfermement (lock-in) de ses utilisateurs et partenaires

Il serait possible de croire qu’un des objectifs de l’initiative serait d’offrir une expérience unique qui fidéliserait les clients et limiterait la réutilisation du contenu (un peu comme le format interactif de iBooks). Cependant, ce n’est pas le cas.

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D’une part, lorsqu’un utilisateur partage l’article sur un réseau social, le lien pointe automatiquement vers la version mobile de l’article. Ainsi, bien que le contenu soit plus « riche » sur Facebook, il est toujours possible de le consulter directement sur le Web.

D’autre part, le framework avec lequel Facebook a créé ce nouveau produit est disponible sur GitHub. Ainsi, bien que l’objectif soit d’offrir une meilleure expérience, la compagnie de Menlo Park ne cherche pas à garder la recette secrète. Facebook est fier de son ouverture et cherche à monétiser son offre différemment.

 

Créer une expérience plus engageante

La solution la plus simple est souvent la meilleure : le succès du format « App Install » a démontré la puissance d’une expérience intégrée. Le format App Install est très simple : lorsqu’un utilisateur clique sur une publicité d’application, au lieu de rediriger l’utilisateur dans l’App Store de Apple, un écran se surimpose sur le fil de nouvelles. L’utilisateur peut alors effectuer son téléchargement et, une fois l’action complétée, l’écran disparaît pour lui permettre de continuer à parcourir son fil de nouvelles.

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Avec ses Instant Articles, Facebook vise à offrir le même genre d’expérience pour un cas d’usage très commun à la plateforme : la lecture de nouvelles.

Aussi, Facebook ne s’est pas caché de vouloir améliorer la qualité du contenu sur son site. À l’instar de Google, il est constamment en train de mettre à jour son algorithme pour combattre les articles trompeurs (clickbait). En hébergeant les contenus sur ses serveurs, Facebook peut obtenir une information beaucoup plus précise sur la qualité de ces contenus.

En somme, en offrant une expérience supérieure, Facebook compte garder ses utilisateurs plus longtemps sur la plateforme et les monétiser ainsi.

 

Le début de la fin pour Internet?

 

D’emblée, cette annonce peut ne pas sembler être pertinente pour un grand nombre de compagnies. Cependant, elle est symptomatique de changements importants à venir pour le Web.  

D’abord, elle confirme l’importance d’une expérience de qualité. L’importance de la vitesse de chargement sur la satisfaction d’un visiteur est bien connue et se confirme avec le cas des Instant Articles; la vitesse avec laquelle ils s’affichent est impressionnante.

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Là où le bât blesse, c’est qu’il semble que seule une expérience native (c’est-à-dire contrôlée par une application comme Facebook) peut offrir une expérience de ce calibre. Par exemple, Flipboard a dû se passer de certaines technologies fondamentales du Web (comme le DOM) pour pouvoir offrir une expérience aussi riche que celle de ses applications mobiles. Ces deux cas tendent à démontrer que nous avons peut-être atteint les limites du Web tel que nous le connaissons (HTML, CSS, JavaScript, dans un fureteur).

Il est encore trop top pour dire si les Instant Articles annoncent le début de la fin pour Internet. Cependant, ils illustrent un changement important dans la dynamique qui a prévalu jusqu’à maintenant entre les réseaux sociaux et les médias : plutôt que de produire du contenu et le publiciser sur différentes plateformes, le contenu devra maintenant être produit POUR chaque plateforme. Internet (site consulté par un fureteur) ne devient plus qu’un canal parmi tant d’autres.

Certes, les Instants Articles ne sont pas encore disponibles pour tous (et il n’existe pas encore de format pour les marques). Cependant, ils s’inscrivent dans une tendance claire, soit l’importance grandissante des formats « natifs » à chaque réseau (comme Discover pour Snapchat et les Cards de Twitter).

Ce n’est qu’une question de temps. Les organisations ont donc tout intérêt à préparer ce changement en mettant en place des stratégies de contenu holistiques et en créant des processus de gestion de contenu robustes.