Chef de pratique média numérique
Think Finance 2018 – Les institutions financières en mode agile!
Chef de pratique média numérique
Quels défis attendent les institutions financières en marketing numérique? Retour sur les présentations de Michele Romanow, Tony Chapman, Kristi Woolrych, Nicolas Darveau-Garneau et Desmond Andrews.
J’ai eu l’occasion d’assister à la conférence Think Finance 2018 aux bureaux de Google à Toronto mercredi dernier. Cette conférence présentée par Google est destinée aux spécialistes en marketing numérique qui opèrent dans le milieu de la finance et des assurances. Les enjeux auxquels sont confrontés ces professionnels laissent place à autant d’opportunités que de risques. Laissez-moi vous présenter les propos qui m’ont le plus marqué en tant que spécialiste média numérique et expert en display.
Michele Romanow : le défi des start-ups et de la cryptomonnaie
Mes premiers constats portent sur la dernière conférence de la journée, celle donnée par l’entrepreneure et investisseure Michele Romanow, connue pour sa participation à l’émission Dragon’s Den et co-fondatrice de Clearbanc, une entreprise qui accompagne et finance différentes entreprises émergentes du milieu financier.
Les grandes banques proposent actuellement jusqu’à 300 produits et évoluent dans un milieu qui change lentement. L’arrivée des start-ups en fintech pourrait créer d’importantes perturbations car ces dernières sont plus aptes à saisir rapidement les opportunités et parce que la majorité d’entres elles se concentrent sur un seul ou quelques produits à la fois. S’il vient à exister une startup qui arrache une part de marché aux banques traditionnelles pour chacun de leur 300 produits, elles n’auront d’autre choix que de s’adapter ou de revoir leur offre.
On a qu’à penser à un joueur comme Wealth Simple, qui a obtenu une croissance phénoménale dans le milieu de la gestion de placements grâce à son offre unique. Les entreprises agiles arrivent à répondre rapidement aux besoins des consommateurs en constante évolution. Mais le défi des banques ne s’arrête pas à la concurrence créée par la fintech, ces institutions doivent aussi s’adapter à la cryptomonnaie, considérée comme une menace de plus en plus réelle à la monnaie traditionnelle.
Chapman et Woolrych : un problème de différenciation
De leur côté, Tony Chapman et Kristi Woolrych ont abordé les enjeux liées aux marques des banques traditionnelles. Selon une étude, 76% des particuliers considèrent qu’il n’y a pas ou peu de différence entre la banque qu’ils utilisent et la compétition. C’est donc dire qu’elles offrent essentiellement les même produits avec un service qui dépasse rarement les attentes.
Pour contrer cette tendance, Chapman recommande aux banques de miser sur deux éléments : l’utilisation du mobile et le sentiment de confiance. Les applications mobiles des banques n’arrivent pas encore tout à fait à répondre aux besoins croissants des utilisateurs. Ils doivent multiplier les efforts pour se démarquer de la compétition. Ces institutions doivent également créer des liens émotionnels avec leurs clients, et ce, travers une relation de confiance. Les banques accompagnent leurs clients à travers différents projets de vie, et c’est en créant des solutions adaptées aux réalités de leurs clients qu’ils pourront enrichir cette confiance.
Dans un discours de performance de marque, Woolrych a expliqué comment le groupe Suncorp, l’entreprise où elle travaille, s’est servie des données et de la science pour tester différentes itérations créatives en format vidéo, le tout, dans le but de maximiser l’impact d’une publicité sur la notoriété de la marque. Ils testent leurs publicités d’abord en numérique, pour ensuite mettre de l’avant le message le plus performant à la télévision. Le truc? Mettre en place un système always-on et ajuster constamment à partir des apprentissages des itérations précédentes.
Cette approche a fait ses preuves, générant des résultats dépassant les attentes pour la marque phare du groupe et très prometteuse pour l’ensemble des autres marques. D’ailleurs, Adviso a aussi testé (fructueusement) une approche similaire pour Lassonde, où plus de 75 déclinaisons ont été créées puis analysées pour changer rapidement et efficacement la perception de la marque auprès d’audiences qualifiées.
Darveau-Garneau et Andrews : vers une gestion ouverte des budgets
La prochaine grande étape pour l’optimisation des budgets de performance est l’identification de la valeur à vie des utilisateurs, et son influence sur les décisions médias. Ce sujet a été discuté par les conférenciers Nicolas Darveau-Garneau et Desmond Andrews. Ils ont expliqué qu’une fois que la valeur des clients potentiels est connue, on doit assigner un CPA plafond à nos campagnes et maximiser l’acquisition de clients. Or, pour mettre un tel système en place, il faut plusieurs éléments :
- Être certain à 100% de la valeur à vie des utilisateurs : Andrews expliquait avoir travaillé avec les équipes en comptabilité et finance pour arriver à une valeur sensée. Si on estime un montant trop haut, on limitera grandement notre investissement, mais un montant trop bas fera en sorte que nos investissements ne seront pas rentables.
- Segmenter les utilisateurs : les clients n’ont pas tous la même valeur et il faut arriver à identifier ces clients avant même de les cibler. En combinant les données primaires et celles des fournisseurs, on peut arriver à identifier les utilisateurs qui ont le meilleur potentiel de profitabilité.
- Comprendre l’attribution et développer son propre modèle : allons au-delà de l’attribution en last-click sur les engins de recherche. L’impact d’une campagne Youtube ou médias sociaux peut avoir un impact mesurable sur les résultats produits via les autres canaux. Il faut comprendre cet impact et arriver à balancer les différents canaux.
- Rattacher les données d’affaires aux achats programmatiques : ce ne sont pas tous les produits qui peuvent renvoyer l’information de rentabilité en temps réel. Certains nécessitent une analyse humaine de la soumission afin de valider la valeur potentielle de celle-ci. Un système de suivi doit être mis en place pour rattacher cette information à la plateforme d’achat média.
- Tout sauf le statu quo : il est tout à fait normal de ne pas avoir la solution parfaite au jour 1, mais l’important, c’est d’avancer. Ça implique parfois de travailler avec des estimés et quelques incertitudes mais c’est beaucoup mieux que de rester à la case départ.
Une fois ces éléments en place, on comprend aisément qu’on peut travailler avec un budget quasi-illimité, tant et aussi longtemps que l’investissement rapporte plus que ce qu’il en coûte.
On peut constater dans le graphique ci-présent que le profit par client supplémentaire est généralement décroissant dans un contexte d’acquisition. La clé est donc d’identifier à partir de quel investissement la courbe de profit devient négative.
Selon Darveau-Garneau, il y a généralement un ou deux annonceurs par pays qui se démarquent, et qui ils sont très profitables. Il s’agit d’arriver à bien mesurer son investissement pour se démarquer du lot.
Prochaines étapes : place à la transformation
Une évolution s’impose pour les banques et leurs départements de marketing dans les prochaines années. On implante des cadres de travail agiles afin de maximiser le nombre de tests et rapidement identifier l’itération la plus efficace pour notre produit. On mise sur la science et les données, on innove sans cesse. Ce contexte n’invite pas seulement à plonger dans la gestion du changement et de l’innovation, mais aussi à s’immerger dans une transformation profonde de l’entreprise.
Les différents partenaires d’affaires gravitant autour de cette industrie ont un rôle important à jouer dans cette transformation. Nous nous retrouvons souvent au carrefour de multiples questions stratégiques qui touchent tant les opérations marketing que les grandes orientations d’affaires. Certaines entreprises financières songent à internaliser des fonctions d’opérations traditionnellement confiées aux agences et d’autres externalisent davantage l’exécution pour ne conserver que la réflexion stratégique à l’interne.
Depuis quelques années, nous avons eu la chance d’être aux premières loges de ces grandes réflexions, en étant à la fois témoin et agent de changement. Notre expérience nous permet d’agir en tant que conseiller auprès de la haute direction, tout comme d’accompagner des équipes marketing à passer à l’action et mettre en place les changements souhaités.
Une industrie qui se transforme, c’est une industrie qui offre l’opportunité à ses partenaires d’innover. Devant ces mutations, il ne faut pas aller à contre courant par peur de perdre nos droits ou rôles acquis, mais plutôt être facilitateur et même parfois initiateur.
Vous avez des questions sur les sujets abordés lors de cette conférence de Think Finance? Laissez-moi savoir dans la section commentaires!