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Retour sur le UX Camp Ottawa 2014

Rédigé par Marion Peres | 2 déc. 2014 00:00:00

L’année dernière, Thomas vous a présenté les grandes idées du UX Camp Ottawa 2013. Les 8 et 9 novembre derniers, le plus grand événement canadien autour de l’expérience utilisateur célébrait sa cinquième édition. Pour l’occasion, pas moins de trois spécialistes d’Adviso se sont rendus sur place pour  assister aux conférences de neuf auteurs et experts contribuant activement à l’amélioration de l’expérience web, parfois depuis plus de 15 ans. Voici donc le premier article d’une série dédiée aux idées et méthodes qui nous ont le plus inspirés.

 

Unifier la recherche utilisateur

 

Lors de sa présentation intitulée Beyond User Research, Louis Rosenfeld, nous a rappelé à quel point la recherche utilisateur est fragmentée. D’une part, tandis que des équipes de mesure analysent le « QUOI », les spécialistes de l’expérience utilisateur cherche généralement à comprendre le « POURQUOI ». Or ces deux aspects étant complémentaires, il est crucial d’unifier les données obtenues afin d’optimiser leur interprétation.

D’autre part, le fondateur de Rosenfeld Media insiste sur la nécessité de trouver un équilibre entre les méthodes de recherche quantitatives et qualitatives, l’objectif étant d’obtenir les données les plus complètes possibles sur vos utilisateurs. On remarque d’ailleurs que parmi la vingtaine de méthodes existantes, certaines comme le tri de cartes ou les études ethnographiques se situent justement entre l’étude du « QUOI » et du « POURQUOI » mentionnés précédemment, d’où la nécessité de les sélectionner et de les planifier efficacement en tenant compte de leur durée et du type d’information apportée. 

Des tests utilisateurs « cheap and fast »

Trop cher, pas le temps, attendre la prochaine refonte, manque d’expertise… qui n’a pas une bonne raison de remettre les tests utilisateurs à plus tard? L’an dernier, Jason Westerlund du National Art Center nous montrait que les contraintes de système ou d’organisation ne devaient pas être un frein à l’amélioration de l’expérience utilisateur et que chaque opportunité de tester son site devait être saisie. Cette année, l’intitulé de la présentation de Steve Krug, You’re NOT Doing Usability Testing? Are You… Nuts?, en disait déjà long sur ce qu’il pense des entreprises qui ne testent pas leur plateforme web. Si vous vous demandez : « Pourquoi perdre du temps (et de l’argent) à écouter des gens parler de problèmes que je connais déjà? », l’auteur du livre à succès Don’t Make me Think et de Rocket Surgery Made Easy  vous répondra tout simplement : « Parce qu’ils trouveront aussi les problèmes que vous ne connaissez pas encore ». Pas besoin non plus, selon lui, de faire des recrutements à la pelle et de perdre un temps fou en retranscriptions et analyses. Il vous suffit de suivre la procédure suivante :

  • Recrutez trois utilisateurs : c’est un nombre suffisant qui permettra déjà de trouver plus de problèmes qu’on ne peut en résoudre.
  • Visionnez le test sur un écran, depuis une autre salle (pas de lab, ni de miroir).
  • Enregistrez-le avec un outil simple (comme Camtasia par exemple).
  • Évitez les rapports de trente pages que personne ne lira. Un débrief rapide pendant le dîner suffira amplement.

Enfin, voici les six conseils de monsieur Krug pour optimiser l’efficacité de vos tests utilisateurs :

  1. Débutez les tests plus tôt dans le projet : vous pouvez tester un site ou une application existante (en projet de refonte), les sites et applications des concurrents, un « sketch » ou une maquette, ou encore des prototypes préliminaires.
  2. Testez régulièrement : planifiez vos tests à l’avance et en dehors des « sprints » du développement. Dites-vous que quelle que soit l’étape du projet, un test vous apprendra toujours quelque chose.
  3. Recrutez librement : inutile de vous prendre la tête à chercher des profils de testeurs correspondant exactement à votre cible. Les problèmes liés à un segment d’utilisateur finiront par être découverts.
  4. Faites des tests une activité de spectateurs : installez les observateurs bien confortablement autour d’une boîte de beignes ou croissants à 5$ (chacun) pour rendre le visionnage d’un test utilisateur aussi attrayant que celui d’un match de hockey.
  5. Concentrez-vous sur un petit nombre de problèmes prioritaires (détectez les trois problèmes majeurs ressortant de chaque test) et traitez les plus difficiles en premier.
  6. Enfin, soyez fainéants! Préférez une correction qui réglera votre problème à une refonte majeure qui risque d’en créer de nouveaux.

Vous voilà maintenant équipés et fin prêts à rendre vos projets plus performants que jamais en matière d’expérience utilisateur! Pourtant, selon la taille, la nature et le fonctionnement de votre organisation, il sera plus ou moins facile de faire appliquer toutes ces idées. Heureusement, certains intervenants ont pris la peine de nous donner quelques clés pour mieux faire accepter ces changements :

Réduire les obstacles à la communication

On a souvent tendance à associer le changement à une perte, et il est nécessaire d’avoir conscience de ce comportement pour mieux le contrer : Au-delà de la planification, Lou Rosenfeld a mentionné l’importance de créer une communication efficace avec ses collaborateurs en tenant compte d’intérêts communs et en bannissant le jargon susceptible de les refroidir.

Extrait de « Beyond User Research » : La matrice pour mieux s’entendre avec ses collègues (comme quoi il y a vraiment une matrice pour tout)

De son côté, Abby Covert, spécialiste de l’architecture d’information, rappelait à quel point celle-ci est subjective. Elle suggère donc de mieux s’adapter au langage de ses interlocuteurs et de schématiser l’information au maximum (en utilisant des modèles existants et en en créant de nouveaux) afin de mieux comparer les modèles et interprétations de chacun.

Tenir compte des personas organisationnelles

Enfin, Kim Goodwin, lors de sa conférence intitulée Designing how to design, proposait de contrer la réticence au changement de deux manières :

– Créer une insatisfaction avec le statu quo (notez que les tests utilisateurs dont nous parlions précédemment peuvent aider à cela)
– Être clair sur ce que le changement englobe et faire en sorte que l’information soit communiquée à tous les niveaux (horizontal et vertical)

Extrait de la présentation « Designing How to Design »
de Kim Goodwin

D’autre part, Kim nous encourage fortement à accorder davantage d’attention aux valeurs et attentes de l’organisation que l’on souhaite faire changer, et de la considérer comme une persona à part entière. On aurait alors quatre grands profils d’organisations :

  • Le Clan, qui valorise les ressources et l’expertise interne, aura une approche plutôt flexible et orientée client. Les rôles de chacun sont bien définis et le vôtre, en tant que spécialiste UX, est de coacher vos collaborateurs. Rappelez-vous que le clan favorise la participation et la collaboration, et rejette toute exclusion.
  • L’Adhocratie est une organisation de style start-up, recherchant une expertise externe et valorisant la flexibilité. Dans ce cas, vous devez devenir un  « Ninja du tableau blanc » : maximisez les sketchs et les retours utilisateurs, et évitez le mot « processus ».
  • Le Marché est une organisation focalisée sur l’externe, ayant malgré tout besoin de stabilité. Vous serez alors un véritable scientifique de l’expérience utilisateur, capable de présenter vos recommandations sous forme de rapports et statistiques, en mettant l’accent sur les données (en particulier le quantitatif), et en évitant à tout prix le risque et la perte de temps.
  • Enfin, la Hiérarchie valorise également tout ce qui peut accroître son contrôle et sa stabilité. Elle est cependant orientée vers les ressources et l’expertise internes. Si vous êtes dans ce cas de figure, vous devrez donc devenir un expert en conception et processus, capable d’apporter un maximum de structure et de minimiser les risques.

Conclusion

Pour finir, voici un récapitulatif des points à retenir :

  • Avant de vous lancer dans la recherche utilisateur, prenez le temps de réfléchir aux données dont vous avez besoin et au temps dont vous disposez, puis planifiez.
  • Testez, testez, et testez vos sites pour les améliorer, et privilégiez les corrections aux refontes. Vous ferez moins d’erreurs et ça vous coûtera moins cher.
  • Communiquez avec vos collaborateurs, et vulgarisez l’information au maximum. Vos idées passeront mieux.
  • Enfin, adaptez votre discours aux besoins de votre entreprise.